Vêtements & Catastrophes...

Comment qualifier cette journée qui commençait ? Comment juger ce spectacle, laissant apparaître l’astre du jour reprendre ses droits ? Agréable, joli, magnifique. Tant d’adjectifs mélioratifs qui s’orientent vers le même but : c’était cool, quoi. Voilà la seule pensée qui me traversait l’esprit, moi, Kyusa Hakono et premier Capitaine du Shireikan de l’Humei Kongen, sorti tout droit de ma chambre, dont la porte se refermait derrière mes pas. Je soupirais, ce qui couvrit le bruit de la poignée de la porte qui se relevait dans un clic sourd, alors que je balayais du regard le couloir vide, froid, dont le carrelage multicolore me renvoyait mon reflet.
Mon regard me trahissait certainement, et c’était avec nervosité que j’avançais, pas après pas, dans les couloirs de la citadelle. J’avais toujours détesté les magasins… Les magasins de vêtements, ouais. Je haïssais les essayages. Et malgré moi, mes pieds et mon bon sens me poussaient à continuer. Luttant durant les premiers mètres, ce ne fut qu’après m’être rattrapé in extremis à la rambarde des escaliers qui me dirigeraient vers l’extérieur que j’abandonna toute vaine tentative de résistance… J’avançais ma main sur la porte en chêne massif qui me séparait de l’extérieur, et alors que j’exerçais une douce pression sur le bois, le soleil et ses rayons caressaient doucement mon visage, et le vent m’enveloppait d’une brise de printemps.

Ce léger stress qui m’avait occupé les dernières minutes s’était envolé en synchronisation avec une hirondelle, passagère, qui s’envolait alors que mes pieds grinçaient sur les graviers. Le printemps arrivait à grand pas, me disais-je. C’est donc, avec une bonne humeur naissante que j’acceptais ma tâche, bien que très légère, mais tellement rébarbative à mon goût. J’aimais le concret, les actions, les faits ! Ce genre de trivialités, bien qu’ayant à elles seules une importance, m’insupportaient. Mais les quelques éléments que Dame Nature avait laissé sur mon chemin avaient balayé tout ce doute.
Mon regard était fixé sur les bâtiments qui m’entouraient, tout ce brassage de monde m’impressiona toujours autant, bien qu’il n’égalait pas celui de l’ancien Konoha. Je cherchais me dirigeait vers le Shireikan. Je n’y résidais pas, ayant préféré loger à côté, car je ne souhaitais à aucun prix d’être plongé au cœur de l’effervescence. Le calme est une des meilleures amies du shinobi, avec la concentration. Quel silence se synthétisa autour de moi au moment où je me figea devant les deux énormes portes de métal du bâtiment principal de l’Humei Kongei, placé sous mon autorité. J’étais fier, et je bombais le torse d’honneur alors que de mes deux bras musclés, j’ouvrais les portes devant moi. Bien sûr, je n’attendais pas moins que l’accueil qui me fut reservé.

- Capitaine Hakono, bienvenue !
- Hakono-Taicho, avez-vous besoin de quelque chose ?
- KYAAAAAAAAAAAAAAAAAAH, c’est Kyusaaaaaaaa !

Ne souhaitant ouvrir ma bouche par pur soucis d’économie d’énergie, je les congédiais tous d’un mouvement de main alors que je grimpais les escaliers, dévalant les marche quatre par quatre, vers le pallier de parquet reluisant. Là, une nouvelle porte était là, prête à m’accueillir. Ce fut avec plaisir que je lisais mon nom sur la plaque d’or, collée au mur. D’un mouvement de bras plus violent, je faisais claquer la porte de l’autre côté, et je m’aventurais dans mon bureau, refermant à moitié la porte derrière moi. J’avançais lentement, un sourire sans joie m’étirant les lèvres. Une couverture de soie était posée sur mon bureau, en chêne lui aussi. Je soulevai le tissu, et, à ma grande surprise j’explosai d’un rire cristallin, et je mis un bon bout de temps à reprendre mon calme, un rictus de joie désormais imprimé sur le visage. Mes vêtements de cérémonie de Capitaine… Un poil trop grand, ça, je le sus d’entrée de jeu. Mais…

- C’est… C’est quoi ce bin’zzzzzzzzzzzzzzzz ! , hurlais-je, face à ma glace.

Devant le miroir, je restai coi. Voilà que j’apercevais ma tête, seule, alors que mes bras, mes jambes et tout mon corps semblait avoir été aspiré par le vêtement. Je nageais… Oui, je pagayais même dans mon katana cérémonial.

Sinistre citadelle, bercée d’un rayon de lumière solitaire. Mes yeux ne peuvent quitter cet orifice lointain qui permet au soleil de faire timidement son office. Une cité enfouie, voila a quoi nous en sommes réduits. Et l’écho de la moindre activité qui se produit ici se répercute le long des parois, donnant naissance à un curieux brouhaha de fond. Certes, c’est plus agréable que les fracassements incessants de la guerre, mais ce n’est pas un village. Ce n’est pas Konoha. Cette cité n’a rien de sa lumière, de sa musique, de sa vie. Que puis-je y faire, maintenant ? Quand je vois ou mes agissements nous ont tous menés, je préfère encore m’abstenir. Il est clair que ce n’est plus à moi de faire revivre Konoha de ses cendres. J’ai détruit de mes propres mains le seul héritage que mon grand-père m’ait confié.



Effleurant ma poitrine abondante, et le pendentif de cristal qui l’orne, je soupire. Apres tout, nous sommes quand même la preuve qu’un espoir perdure. Au sein de cette ambition un peu folle, j’ai un rôle à accomplir. C’est une raison suffisante pour continuer de vivre. Trèves de rêvasseries vaseuses pour aujourd’hui, j’ai suffisamment à faire. A commencer par aller féliciter quelqu’un… La quasi-religiosité avec laquelle le bâtiment principal de la première division a été décoré me mets profondément mal à l’aise. Nous n’avons pas battit cette cité pour exercer des activités aussi superficielles que l’ornement. Et si le but de cette tentative désespérée est de rendre cette ville souterraine moins sinistre, c’est râpé. Avant même d’y avoir mit les pieds, je sais d’ors et déjà que je ne me rendrai pas souvent dans le bureau du tout premier Capitaine du Shireikan.



N’écoutant que ma répulsion pour ce lieu, je saute tout bonnement du toit du Shireikan, quittant des yeux mon petit rayon de lumière pour aller en saluer un autre. Accéder au bureau de Kyusa par l’extérieur limite les risques de tomber sur un trou du cul au détour d’un couloir, assurément, un avantage non négligeable quand on ne se sent pas d’humeur à torcher qui que ce soit. Un premier rebord, puis un second, et le troisième est le bon. J’atterris lourdement sur les planches, et m’avance dans le bureau, incapable de me retenir plus longtemps devant pareil spectacle.



Il m’arrache un sourire avant même que je m’en rende compte. Même empêtré dans des vêtements de cérémonie trop grands pour lui, le regard désemparé par la situation, et une légère angoisse dans le regard, Kyusa-kun dégage quelque chose de presque palpable. Peut-être la foi en un avenir meilleur ? Je ne peux que l’espérer, et l’aider du mieux que je peux dans ses futurs devoirs. C’est maintenant à lui de prendre en main les futures générations.

Peut-être qu’a ce moment, les jurons qui traversèrent ma bouche et dont l’écho se répercuta contre le plafond de pierre auraient pu me choquer si je n’avais pas été aussi desemparé par la situation. Je remuais pitoyablement, aveuglé par les violents rayons de soleil qui traversaient ma fenêtre pour venir s’écraser dans mes pupilles. Mes bras et mes jambes se perdaient dans l’abondance de tissu et de plis. J’avais beau être courageux que la situation me dépassait totalement. Ma phobie des vêtements revenue, je rampais misérablement vers le pied de mon bureau, renversant une ou deux chaises en orme massif au passage. Mon katana rayait le parquet, mais je m’en fichais. Mon esprit était plongé dans une sorte de transe dont je n’arrivais pas, à me sortir…

*Merde… On m’a eu… Je jure, que si je retrouve l’incapable qui m’a taillé cet habit, je lui fais manger jusqu’au dernier bouton… Aidez-moiiiiiii !*

Soudain, un bruit sourd sembla provenir du plafond, que je fixais, naïvement. Relevant un bras, plus l’autre, je parvins à me hisser sur les fesses. Ayant définitivement perdu mes mains dans mon champ de vision, je poussai un long soupir alors que j’essayai vainement de me diriger vers mon bureau. Jamais, même un genjutsu d’immobilisation, je ne m’étais senti aussi… Nul, impuissant. Je savais ce que j’étais. Je savais également ce que je représentais. Tous ces artifices, mis en place pour décorer les murs, orner les façades et embellir les bâtiments n’étaient que trivialités. Et je déteste, les choses inutiles. Malgré tout, j’étais forcé de garder une image sobre, du Capitaine Impartial et Solennel. Ainsi, j’avais laissé faire. Mais toute cette stérilité me rendait malade.

*Quelqu’un approche… Qu’on me retire cette camisole de force, bordel !*

Le bruit s’accentuait alors que j’entamais une brasse puissante et rapide pour m’extirper de ma cellule. Rien à faire. Retombant lourdement sur le parquet, je lâchai un autre soupir, plus profond et plus long encore. Plus qu’à attendre la suite… Soudain, la fenêtre s’ouvrit en grand, au même moment que ma bouche. Je restai coi : Tsunade Koichi ! L’ex-Hokage, actuelle capitaine honorée et respectée respectée de la sixième division, mon ancienne supérieure et une des personnes les plus chères à mon cœur, venait d’entrer dans mon bureau par la fenêtre. Et malgré cet air ébahi, je n’étais pas vraiment surpris.
Je l’admirai, à l’envers. Aux jambes musclées, à la poitrine divine et aux traits fins, elle avait tout pour plaire. Son visage était marqué de traces indélébiles que seules quelques personnes encore vivantes, comme le Capitaine Uchiwa ou moi, étions capable de déchiffrer, en partie du moins. Cette fichue guerre avait ruiné la vie de cette femme, et cela, ça me désolait plus que n’importe quel autre malheur qui aurait pu survenir. Tout ce que nous pouvons faire, c’était bannir le doute de l’esprit de Tsunade, et d’y remettre la sérénité sur le trône.

Je comprends alors qu’il faut arrêter de me concentrer sur le passé. Que nous avons tous pu faire des erreurs, qui que nous soyons, et que le temps du regret est révolu. Les pleurs ne servent plus à rien. Désormais, nous nous devons de sourire, même devant la mort, même devant le désespoir. Mais ce qui me fait sourire, c’est la phrase qu’elle me lança. Même, j’explosai de rire, et je retrouvai toute ma joie. Je réponds, avec tout autant de joie, ramassant mon katana, et me retriant d’un vif mouvement du poignet cette torture de tenue de cérémonie, laissant apparaître mon long kimono noir, dans lequel j’étais tellement plus à l’aise.

« Tu sais très bien que tu peux m’appeler comme tu le souhaites, Capitaine Koichi ! La guerre m’a ramolli ! A croire que tu es bien plus en forme que moi, malgré les années ! M’enfin, je demanderai aux couturiers de la Division Première n’arrêter de boire avant de se mettre à l’œuvre : il y avait la place pour deux, là-dedans ! Mais, je manque à tous mes devoirs, assieds-toi. », disais-je, en tirant une des chaises que j’avais fait tomber.

Alors, je croise ses yeux chatains, tellement envoutants. Me sentant rougir, face à une femme si importante, je me contentai d’adresser un sourire embarassé, ainsi que me caresser la nuque…

Bizarre. C’était le maitre mot de la situation. A le voir empêtré ainsi comme un gosse qui jouerait avec les vêtements de sa mère, j’avais l’impression de me retrouver face au Kyusa d’avant guerre. Ce jeune gamin intrépide qui courrait partout dans les rues de Konoha. Et pourtant son regard déterminé, ses muscles saillant sous sa tenue décidemment rocambolesque, éloignaient peu à peu cette sensation étrange. Sa voix était plus grave, le ton en était plus posé, et il était désormais Capitaine. Non, Kyusa n’avait plus rien d’un gamin.

Sa mésaventure avec sa tenue cérémonielle ne pouvait que me rappeler la mienne…Plaçant mes paumes de chaque cote de mes seins pour les rehausser un peu, la moue parodiquement boudeuse, je rétorquais.



En effet, ma propre tenue cérémonielle ne pouvait entourer totalement ma poitrine, sous peine de présenter a tout fin observateur une tension telle que la soie manquait de céder d’un instant a l’autre. Si l’on considérait l’immense pression qu’un pareil corset exerçait sur mes poumons, je ne pouvais le porter plus de 5 minutes sans devenir rouge, puis violacée, pour finir livide et évanouie sur le sol, en rade d’oxygène. L’Houmei Kongen était peut-être doué pour dresser de beaux bâtiments aux ornements minutieux, mais de fins couturiers au sens des proportions valable, cela ne semblait pas courir les rues. Cela, couplé a mon désintérêt le plus total pour la politique de cette ville, faisait de moi une porteuse très occasionnelle de ce genre de vêtements de cérémonie, n’en déplaise a certains autres.
Kyusa me proposa de m’asseoir. Ma foi, à mon âge ce genre d’invitation ne se refusait pas. Et puis une poitrine comme la mienne faisait travailler les lombaires. Un peu de soutien supplémentaire n’était pas de refus. Il redressa une chaise alors au sol, renversé par son court instant de panique face a ce premier imprévu sans demi-mesure, au sens littéral du terme. Il prononça le mot devoir. Un terme lourd de sens, pour nous autres, survivants, et certainement derniers représentants de notre ancien empire. Qu’il sorte de sa bouche en cet instant montre a quel point le jeune homme a grandit. C’est une lourde tache pour ses frêles épaules, mais ma confiance en lui dépasse de bien loin toutes les appréhensions susceptibles de m’habiter, et plus encore celles qui peuvent le hanter, lui. Il y parviendra, comme d’autres ont réussi avant lui. Non. Il fera encore mieux, parce que c’est ainsi que vont les choses, et il ne reproduira pas nos erreurs stupides.

« Et bien et bien, te voila Capitaine. L’occasion pour nous d’enfiler ces ridicules accoutrements une fois de plus et convoquer un Conseil pour perdre tu temps en bavardages inutiles… Il fut un temps, on aurait fêté ca autour d’un verre de saké, mais je crois bien que ma dernière bouteille est vide. Décidément tout fout le camp. ^^ »

Le ton léger de la remarques visait à détendre quelque peu l’atmosphère. Nous n’avions pas beaucoup rit, ces derniers temps, et sourire semblait déjà être en soit un effort conséquent. Je réalisais ceci en sentant les muscles de mes joues se raidir, comme peu enclins a afficher telle expression. Et pourtant, elle était sincère, cette émotion. Le regard du jeune Capitaine croisa le mien. Lui aussi, en ressentait le besoin. La joie semblait inhérente au courage, et nous en avions terriblement manqué ces derniers mois.

« Je tenais à te féliciter personnellement. Tu sais, avant l’investiture officielle, la levée des sabres, le sceau, et tout le tralala… Je ne voudrais pas que le profond respect que j’éprouve face a ta nomination se perde entre deux lancés de confettis et des discours si sérieux qu’ils pourraient assommer un âne. »

L’âne, c’était moi d’ailleurs. Le plus clair de ce genre de petites réunions, je le passais à dormir, ou a m’illustrer par mon absence, ce qui ne me rendait pas très populaire auprès du Conseil. Mais j’avais bien trop à faire pour perdre du temps à écouter des informations certainement moins chiantes une fois transformées en compte rendu. L’Houmei Kongen, c’était une lourde organisation, et a lourde organisation, lois pompeuse. Et voila que dorénavant Kyusa baignait en plein dans cet univers de règles a n’en plus finir… Cela m’intriguait presque, d’un point de vue personnel. Qu’avait donc le Capitaine Hakono en tête pour se dévouer ainsi a un service qui représentait tout ce que j’avais toujours fuit de mon temps d’Hokage.

« Je voulais aussi savoir comment tu allais. Depuis ta nomination, nous n’avons pas vraiment eu l’occasion de bavarder…et avec ton investiture officielle qui approche, je doute que l’occasion ne se présente d’avantage à partir de ce soir. »

Il avait l’air détendu, avec son petit sourire aux lèvres et sa main derrière la nuque. Presque s’il ne se balancait pas sur la chaise avec autant de nonchalance qu’on jette nos vêtements en fin de journée sur le sol d’une salle de bain. A peine arrivé à son poste, il semblait déjà posséder les lieux. Chaque seconde qui s’écoulait faisait reculer son hésitation et ses doutes.

Je ne savais plus où me mettre. Mon ex-Hokage, la femme qui m’a appris presque tout ce que je sais, m’intimidait fortement. Essayant du mieux que je peux de camoufler ma gêne en assurance, je n’eus pas trop de soucis à engager la conversation et à me détendre. La voix de Tsunade, sage, et lourde de conséquences, m’imprégnait, et j’avoue qu’elle me faisait presque peur. C’est étrange, certes. Le contraste de mes sentiments et de mes émotions me perturbait. Néanmoins, je réussis à rire de bon cœur suite à la plainte de Tsunade contre sa propre tenue cérémonielle : au moins, j’étais sûr de ne pas être seul, et cette réaction de sa part me grava même un sourire sur le visage que je ne pouvais pas faire disparaître. Lui tendant instinctivement ma propre tenue, qui s’écroulait du bout de mon doigt.

« Tiens. La mienne t’ira certainement. Ils ont dû se tromper de bureau.», annonçai-je, souriant, réalisant bien qu’il était impossible de confondre le massif Shireikan avec le majestueux Jinsei, dans lequel la 6ème division était reine.

Ce vêtement me dégoûtait. Déjà, je savais que j’avais bien fait de culpabiliser dès le moment où j’avais quitté mes appartements. Cette phobie des vêtements n’est pas omniprésente dans mon esprit pour rien. J’aurais encore dû faire confiance à mon instinct. Cet excrément vestimentaire m’avait au moins permis de rencontrer le Capitaine Koichi, en cette journée si importante, et de lui fourni r sa tenue pour cette soirée qui s’annonçait riche en émotions, en surprises et en discours inutiles. Inutile de répéter encore une fois que je déteste les choses inutiles. Je les méprise avec haine et rage. Ainsi donc, je frappai mon pantalon afin d’enlever la poussière qui s’y trouvait.

« Capitaine… Pfiou. Et ton égal hiérarchique, de surcroît. Néanmoins, tu sais bien, que je te considérerai toujours comme mon Senseï. Tu sais, ce Conseil me dégoûte déjà. Blablater pour ne rien dire, c’est lassant. »

Je répondais sur un ton beaucoup plus lourd que Tsunade. Mon visage était calme, lui, mais j’avais du mal à rester totalement enfantin lorsque la pensée du Conseil de ce soir me reprenait. Bien qu’au fond, je n’avais aucun mal à parler devant une assemblée, je détestais le faire lorsque la raison n’était pas suffisante. J’ouvrais mon armoire en grand, avant d’en ressortir un long kimono blanc, qui remplirait à merveille son rôle de tenue habillée, pour une soirée du moins. Cette guerre m’avait tout volé. L’adolescent pré pubère que j’étais avait été catapulté de l’innocence de sa vie réglée telle du papier à musique, à la violence incommensurable de cette foutue guerre.

*Les plaisirs de l’insouciance… Les voilà loin derrière moi. Je dois réussir à reconstruire le puzzle de la paix, et cela avec des pièces manquantes. Je sens que les réponses à mes questions ne vont pas toutes être agréables à entendre. Konoha… Où es-tu ? *

« Me féliciter ? Humphf… Je suis vraiment flatté de tes compliments. Néanmoins, tes craintes sont infondées. Je connais notre dégoût mutuel pour les trivialités. Et alors, tu dois franchement t’interroger sur les motivations qui me poussent à me retrouver au poste du Capitaine qui serait le plus concerné, d’un point de vue paperasse et administration. Et c’est pour une raison très simple : je vais changer tout cela. J’ai compris, que le peuple avait besoin d’une poigne forte pour l’aider à rebâtir ses murailles. Ainsi, il faut essayer d’apporter sa propre pierre à l’édifice, tu ne crois pas ? Konoha n’est physiquement plus. Mais c’est à force de changement, qu’il renaîtra, telle notre vieille équipe ! Le monde va changer, grâce à des gens comme nous. »

J’en avais marre de garder cela pour moi. La réplique, presque lancée sur le ton de la rigolade, me choqua brusquement, et j’eus du mal à ne pas reculer en arrière. Lançant mon sourire le plus chaleureux et un regard chaud et amical à cette femme qui avait tout donné pour son village, j’espérais qu’elle comprendrait ce que je voulais dire. Je la regardai d’haut en bas, et je ne pus m’empêcher de prendre un teint rosâtre. C’était toujours aussi étrange de se dire que Tsunade Koichi, femme sage et au corps de rêve, approchait presque de la soixantaine. Et tellement rageant ! M’enfin, bon… Je fus alors soudainement arraché de mes rêveries par les paroles de la Capitaine.

« A vrai dire, je n’ai pas vraiment hâte d’être ce soir. Toutefois, je me sens divinement bien. La journée est ensoleillée, et si l’on met de côté mes quelques problèmes à enfiler un vêtement correctement, elle ne m’a pas encore réservé de mauvaises surprises… Et te parler me réconforte vraiment. Passer cette journée seule avant cette soirée officielle aurait été une torture. Je te remercie, du fond du cœur. Et, tu sais quoi ? Ce soir, je vais changer les choses. Je veux parler aux divisions pour qu’elles comprennent. Ce sera sous notre autorité que les choses changeront, Tsunade ! » , avais-je presque hurlé un poing en l’air, une main sur le cœur.

*La journée d’aujourd’hui n’aura plus rien d’avoir avec celle de demain.*

« Au fait… Votre division a élaboré le sceau de scellement de chakra, un truc du genre… Est-ce efficace ? Comment optimiser son utilisation ? Un ninja qui ne connait pas ses armes est moins efficace qu’un homme non armé. »

Me dirigeant vers l’imposante chaise de mon bureau, qui ressemblait plus à un fauteuil qu’autre chose, je me laissai totalement tomber dedans, et lâchai un nouveau soupir, de soulagement cette fois-ci. Dégainant un paquet de bonbons fraises, j'en attrapai une première poignée, que je posais sur mon bureau. Enfonçant le premier dans ma bouche, je machai le petit bout de sucre et de gelée avec plaisir. Je jetai le deuxième vers Tsunade, dans l'espoir d'atteindre sa bouche... Quelle peur, j'éprouve, à ce moment précis, en voyant la petite fraise tomber dans le decolleté de Tsunade... J’étais soulagé de savoir que je ne serais pas seul dans cette aventure folle, et contre-la-montre, que nous nous imposions : changer le monde… Si je survivais...

« Merde… »

Je sentais... Le danger ?

Du glucose. Du saccharose. De la gélatine, des acidifiants, et des colorants rouges. Tout cela au creux de ma poitrine… Sur un fond d’idées révolutionnaires, voila que cet amalgame de composants industriels a la chimie douteuse occupait une place de choix au sein, et c’était le cas de le dire, de mon anatomie intime. Et sans même le savoir, Kyusa avait visé juste. Puisse-t-il faire preuve d’autant de flair pour les affaires à venir ! Cette hasardeuse présence d’esprit chassa la petite veine qui pointait sur ma tempe, tandis que des grains de sucre venaient caresser mon ventre.

« Tu es intrigué par le sceau… je vois. »

Je commençais à desserrer ma tunique au niveau des hanches, m’assurant plus d’amplitude au niveau de la poitrine, avant de tirer sur mon décolleté. Suffisamment pour être évocateur, trop peu pour devenir indécent. Dissimulé en temps normal par ma tenue, le sceau d’un noir de jais situé sur le haut de mon sein gauche fut caressé du regard par mon hôte, avec toute la gêne qu’un gentleman peut témoigner face a une vieille peau non-décrépie, tendance bien conservée, comme moi. Il était à l’image de la 6eme division, tordu et incompréhensible.

De nombreux animaux avaient été maltraités pour élaborer ce sceau. Des tests sur des chimpanzés avaient été faits. Des bébés phoques, abattus froidement sur leur banquise. On avait mis du rouge a lèvres sur des anus de singe, et des hamsters s’étaient entre tués dans leurs cages avant que l’Oréal ne commercialise ce fuuin. Si la SPA avait eu vent de ces expériences, nul doute que ce sceau aurait très vite obtenu le statut de Kinjutsu…



Il était temps pour Kyusa de faire un petit tour au cœur même du Jinsen. Le cœur de cette merveille à la fois naturelle et contre-nature recelait de nombres de secrets. Certains qu’il était utile de dévoiler au grand jour, d’autres qu’il valait mieux laisser dans l’oubli. Pour l’instant.



Peut-être. Peut-être qu’un jour je devrais te cacher des choses Kyusa. Je dirais même que cela ne fait aucun doute. Mais, pardonnes moi par avance. Et ce jour la, souviens toi que je n’agis que pour l’intérêt commun… Mon visage portait les marques de ma réflexion, aussi détournais-je son attention soudainement, me relevant avec dignité, le regard bas, avant de m’exprimer de nouveau.



Le ton faussement en rogne, le sourire moqueur, j’observais ce shinobis qui m’avait il y a quelques secondes dévoilés ses intentions, et mis a nu son âme. Il était capitaine. Il avait essuyé une guerre. Il avait vu son village disparaitre, et ses amis mourir. Et a présent, il était inculpé fasse a son ancien Hokage pour un lancé de bonbons frauduleux… Vraiment, on se rattrapait comme on le pouvait !

Zuuut. La petite fraise tagada, en plein vol, venait de s’écraser sur l’imposante poitrine de Tsunade. Bondissant en arrière en prévision d’un katon ultime, ou d’une autre technique dévastatrice qui risquait de m’arriver en pleine face, je tirai une tête d’homme apeuré, certainement persuadé que cette fraise tagada ne connaîtrait jamais l’accomplissement suprême de la vie de sucrerie : finir dans les latrines… Humphf. Je me sentais vraiment nul, sur ce coup. Peut-être aurait-elle mieux fait de m’abattre froidement, sans me laisser le temps de continuer… Toutefois, elle n’en fit rien.

*Ouf… J’ai eu… Chaud.*

Les actions qui survinrent me figèrent sur place. Notamment lorsque Tsunade commença à déserrer son décolleté, que je perdis mon bon sens. J’avais beau deviner les intentions premières de Tsunade, qui étaient de me montrer quelque chose, que mon cerveau, certainement envahi de testostérone, n’arrivait plus vraiment à analyser la situation… Quel con je suis ! Pendant que je rougissais à vue d’œil, je me demandais comment aurais-je pu deviner, ce matin, en me dirigeant vers mon bureau de capitaine, voir son ex-supérieur, sur laquelle il avait jeté des bonbons, lui dévoiler une partie de son sein ! Détournant le regard avec honte, alors que je prenais de plus en plus de couleurs, je fus forcé de faire un effort considérable avant de pouvoir fixer Tsunade sans hurler à la mort. Cependant, la découverte me refroidit instantanément, et, voyant ce petit fuuin qui me fit déglutir, tant il semblait adhérer au chakra.

« On doit se sentir aussi refermé que dans une camisole de force, là-dedans… Mais bon, aucune immobilisation ne me fait peur. Nous sommes tous les deux des durs à cuire, hein ! Et… Desolé pour le bonbon.»

Mes excuses faites, et ce sentiment de gêne envolé, je pus reprendre mon assurance habituelle, que j’avais toutefois du mal à conserver en la présence de Tsunade. Une aura de mystère planait sempiternellement autour de cette femme, et bien que je gardai un air totalement naïf, je me posais des tonnes de questions. Cette femme était torturée de l’intérieur, ça se sentait. Néanmoins, je me sentais tout aussi blessé de ne pas pouvoir faire quoi que ce soit, coincé dans mon monde, si différent du sien. Se sentir aussi impuissant était ma propre torture, à moi. Rien qu’à moi. Et ce combat intérieur, je savais que je devrai le mener seul, avec les propres armes et l’expérience que j’aurai accumulée. En attendant, je devais devenir fort.

« Le Jinsei ? Oh, ma foi… Si ce n’est quelques plans superficiels, je n’ai jamais eu l’honneur d’y faire quelconque visite ! », disais-je, alors que moi-même je me relevai, et me dirigeais peu à peu vers la porte de mon bureau, posant sur mon dos une robe de capitaine, moins volumineuse et ornée de paillettes que la première, mais tout aussi belle, et solennelle.

« Hum ? L’Hiketsu, tu dis ? Quel nom. Je pense que… L’Hiketsu sera une arme redoutable… A nous d’apprendre à ne pas se laisser consumer par sa force… »

Soudain, le comportement de Tsunade, si calme et si respectueux, changea du tout au tout, et je ne pus retenir une grimace lorsqu’elle me lança un regard froid et sévère, empruntant son meilleur ton moqueur pour me parler, et m’accuser ! Moi ! Alors, à ce moment-là, je pensais qu’il était temps de riposter ! Attrapant une grande poignée de bonbons, vidant le reste du petit sachet qui s’envolait, désormais, dans ma pièce, répandant du sucre rouge partout, je me permis de vider la dizaine de petits bouts de sucre dans l’énorme soutien-gorge de Tsunade, avant de lui tirer la langue allégremment.

« Qu’est-ce qu’on dit déjà ? Ah oui… NANANANEREUH ! »

N’avais-je pas fini ma phrase que je courrais… Courrais pour sauver ma vie !

"..."

Il avait osé. N’écoutant que ces impulsions qui avaient fait de moi la reine du sale caractère, je récupérais 8 bonbons, que je coinçais entre mes doigts croisant mes mains devant mon visage, le regard froid et calculateur. Quelques millisecondes d’infime contrôle du chakra, et les fraises tagada étaient à présent aussi dures que de l’acier. Sans plus attendre, je les projetais à travers la pièce tels des kunais, dans la direction de Kyusa, qui s’apprêtait à atteindre la porte. Les fraises se plantèrent dans un fracas impressionnant compare a leur composition moelleuse naturelle, tout autour de la silhouette du capitaine, dessinant ses pourtours sur la porte, qui accusa difficilement pareil choc. Un silence, puis elle grinça, et s’effondra à travers le couloir.
Je frottais alors mes mains l’une contre l’autre afin de me débarrasser du sucre, après avoir viré de mon décolleté les sucreries restantes.



L’air complètement décontractée, je pris tranquillement le chemin du couloir, jetant d’un geste négligé ma veste sur mon épaule, et passant devant Kyusa, faisant mine de ne pas prêter attention a sa réaction. Il était temps pour notre jeune capitaine de découvrir le siège de mes expériences futures, celles qui peut-être permettront de redonner au monde un visage plus accueillant pour nous autres, ninjas.

[Je file poster au Jinsei ^^]